Que choisissez-vous : vivre ou exister ?

Dans ce monde qui évolue de plus en plus vite il est essentiel de pouvoir trouver des ressources qui nous permettent de nous nourrir intérieurement, de nous (re)motiver au quotidien. Je vous parlais récemment de l'évolution du Leadership et de la tendance actuelle à retrouver de plus en plus de recherches qui montrent que la spiritualité et la capacité du Leader à puiser dans ses ressources intérieures sont essentielles. (Voir article).

Je profite donc pour partager avec vous un livre que j'ai lu il y a quelques années et qui nous met en relation avec cette vie intérieure qui fait souvent défaut dans le monde ultra rapide actuel.

Petit traité de vie intérieure. Frédéric Lenoir. Plon 2010.

Exister est un fait, vivre est un art.

C’est par ces mots que F. Lenoir commence son livre. En effet, vivre, cela doit s’apprendre, devenir humain n’est pas naturel mais culturel. On ne naît pas humain, on le devient disait Erasme à la Renaissance.

Le rôle de l’éducation est donc essentiel pour avancer dans cette voie. Ce n’est pas simple à notre époque malgré tous les moyens mis à notre disposition, ou peut-être à cause de tous les moyens mis à notre disposition. Le confort de vie que nous menons n’est en effet pas propice à la mise en action de nos ressources intérieures. Le confort endort, ramollit…

Dans ce traité, l’auteur nous fait voyager à travers ses réflexions personnelles dans les courants philosophiques d’Orient et d’Occident, de la spiritualité chrétienne et la psychologie des profondeurs. Il est évident que Frédéric Lenoir a cheminé.

Ce livre part de son expérience personnelle. C’est un philosophe dans le sens noble du terme. Pas seulement un érudit, un « expert » mais aussi un homme qui met la philosophie en pratique, qui se confronte à la réalité, qui s’observe et se corrige. En ce sens, ce témoignage est très utile pour tous ceux qui veulent s’élancer sur les chemins parfois escarpés de la connaissance de soi et de la conquête de la vie intérieure.

Je me suis personnellement retrouvé très souvent dans ses réflexions et ses constats. Je ne peux qu’adhérer aux différentes constatations qu’il propose pour devenir un être humain qui chemine vers son centre. Il illustre ses réflexions de citations diverses qui nous éclairent et nous font avancer dans notre réflexion.

Pris en tenaille entre une idéologie consumériste déshumanisante et une religion dogmatique étouffante, nous nous tournons vers la philosophie et les grands courants de sagesse de l'humanité. Car les sages du monde entier - de Confucius à Spinoza en passant  par Épicure, Plotin ou Montaigne - nous ont légué des clés permettant de nourrir et de développer notre vie intérieure : accepter la vie comme elle est, se connaître et apprendre à discerner, vivre dans l’ « ici et maintenant », se maîtriser, faire le silence en soi, savoir choisir et pardonner. Ces clés de sagesse universelle n'ont rien perdu de leur pertinence. Elles nous aident toujours à vivre, car si notre monde a beaucoup changé, le cœur de l'être humain est toujours le même. P. 10.

Son petit traité énumère donc les « essentiels » pour aller vers cette vie intérieure indispensable pour mener une « vie bonne ».

Dire oui à la vie, accepter de s’engager, de prendre la responsabilité de notre cheminement. Avoir confiance dans ceux qui ont déjà fait preuve de sagesse tout en gardant une liberté et une capacité de remise en question. Apprendre à s’aimer, à discerner, à équilibrer notre action et notre capacité de régénération. Apprendre à faire silence en soi, à méditer, à s’observer, à acquérir des vertus. Pouvoir contempler la nature et sa beauté qui fait écho en nous-mêmes. Devenir libre ! Se détacher de nos aliénations, mais se rapprocher des autres. Partager, donner, aimer, avoir de l’humour. Voir dans l’adversité du quotidien des épreuves et non des échecs et des problèmes. Accueillir la vie et apprivoiser la mort…

Tous ces thèmes sont abordés avec simplicité, chaleur et une réelle expérience de vie. Chacun pourra en retirer des éléments quel que soit son niveau d’avancement.

Voici quelques passages du livre que j’ai appréciés :

La sagesse commence par l'acceptation de l'inévitable et se poursuit par la juste transformation de ce qui peut l'être. P. 14.

Une vie réussie est toujours le fruit d'un engagement, d'une véritable implication dans tous les domaines de l'existence. (…). Nous sommes en charge de notre bonheur et de notre malheur. Cette attitude est aux antipodes de la position victimale malheureusement très répandue. Certaines personnes ne se sentent en effet responsables de rien : tout ce qui leur arrive est la faute des autres, de la malchance, de l'État. C'est  toujours de l'extérieur que vient le mal et c'est toujours de l'extérieur qu'elles attendent la solution. Elles gémissent sur leur sort au lieu de se prendre en main, refusent de voir leur responsabilité dans ce qui leur advient et attendent systématiquement un secours de l’extérieur. Cette déresponsabilisation provient, en grande partie, d'un manque d'intériorité et de conscience de soi. P. 34.

Être responsable de sa vie, c'est mesurer l'importance de nos pensées, de nos paroles et de nos actions; c'est rester éveillé, en alerte, c'est ne pas vivre dans l'inconscience. Si nous commettons une erreur, si nous agissons mal, si nous nous trompons, reconnaissons-le et essayons, autant que possible, de réparer cette erreur. P. 37.

Se connaître soi-même, c'est alors connaître l'humanité, mais aussi le cosmos et le divin qui se dévoile au plus intime de soi. La maxime complète inscrite sur le temple d'Apollon le dit explicitement : « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux.» Ce qu’un contemporain chinois de Socrate, Mencius, a aussi fort bien formulé : « Celui qui va jusqu'au bout de son cœur connaît sa nature d'homme. Connaître sa nature d'homme, c'est alors connaître le ciel. »

La culture contemporaine a tendance à réduire les objectifs de la connaissance de soi aux thématiques du développement personnel : on apprend à se connaître pour dominer ses émotions, pout mieux gérer sa vie au quotidien. Cet objectif est certes excellent, mais aussi quelque peu réducteur. Il est important de comprendre qu'en apprenant à se connaître soi-même on accède à une perception plus universelle de la nature humaine. Pour les philosophes de l'Antiquité, nous venons de le voir, le travail sur soi était aussi un laboratoire d'humanité. P. 65.

J’apprécie particulièrement le passage précédent car il est au centre de ce que je vis depuis plus de 30 ans maintenant. C’est exactement l’enseignement que j’ai reçu et que je transmets depuis tout ce temps. 

Le sage est celui qui s'est préparé à la mort. J'entends par « préparation » le fait d'agir tout au long de sa vie de telle sorte que lorsqu'advient le moment de notre mort, nous pouvons nous en aller sans regrets, avec le sentiment d'avoir accompli cette vie le mieux possible, d'avoir « bien vécu », c'est-à-dire d'avoir mené une existence juste, droite, bonne, d'avoir été, autant que possible, dans le vrai. P. 165.

Un livre que je conseille à tous. Bonne lecture !